Il y a plus de 30 ans que naquit dans l’esprit de Bruce Meyer un engin révolutionnaire: le MEYERS TOW’D. « 5 ans après la grenouille, le crapaud naquit ». Face à la difficulté de balayer l’histoire complète du TOW’D, nous vous proposons un dossier en deux parties. Pour commencer cette série nous vous proposons une classique étude historique, avant d’étudier dans quelques jours ce qu’est devenu et ce que représente le TOW’D en 2003 […]
Un bref rappel historique :
5 ans après le MANX, création qui le fera entrer dans le Panthéon des créateurs automobiles, Bruce Meyer se senti à nouveau taraudé par le démon du « encore mieux ». Vous savez celui qui vous harcèle jours et nuits, qui une fois qu’il vous tient, monopolise toute votre énergie jusqu’à ce que vous n’en puissiez plus et qui vous réveille en sursaut transpirant à 3h du mat…
Et bien, c’est celui ci qui poussa Bruce Meyer à remettre en question sa creation , SON Manx, qui avait pourtant fait ses preuves en tout terrain en battant contre toute attente des records en tous genres (traversée du désert, peaks pike climb hill…) .
Non content de cela, il voulu créer un engin moins civilisé, moins polyvalent, mais capable d’aller plus vite, plus haut dès que le terrain devenait difficile. C’est ainsi que naquit le Tow’d, un véhicule en kit, sur lequel on aurait greffé uniquement les éléments de Coccinelle réputés indestructibles : le groupe moteur-boite et les trains. Tout le reste, exit !
Pour lier ces éléments, un châssis en tube qui gagnait de la solidité par un grande souplesse (qui a dit que La Fontaine l’avait inspiré ?), une baignoire en plastique simpliste et hop, le tour est joué. Pour tester son délire, il demanda même à un pilote tout terrain de l’époque de lui détruire dans un test acharné de plusieurs jours derrière l’usine. Rien n’y fit !
Ça y était, il l’avait son nouvel engin révolutionnaire : plus léger, plus solide, plus facile à fabriquer pour le novice, plus, plus, plus…
Une esquisse de carrosserie, deux gros yeux, deux coups de crayons pour le faire ressembler à un animal, et voilà, il n’y a plus qu’a produire. Il la tenait une deuxième fois sa consécration !
BF MEYERS y mis les gros moyens : A engin révolutionnaire, méthode de fabrication révolutionnaire : on utilisa du plastique thermoformé plutôt que de la fibre, et on mis en place une logistique d’approvisionnement industrielle et puis …et puis …
C’est vrai que l’engin était fantastique, un look incroyable, des capacités de franchissement outrepassant de très loin celles du Manx…
Mais la poule aux œufs d’or n’était pécuniairement pas au rendez vous.
Gestion de production désastreuse, gros soucis de fabrication avec le plastique (voir chapitre « ça craque »), bref un grand succès conceptuel, mais un désastre financier. Pour couronner le tout, lors de la Baja 1000, Bruce Meyer emmena le Tow’d au delà des limites de la physique moderne et se brisa les deux jambes dans un accident l’handicapant gravement, encore aujourd’hui.
Bref, un bilan assez moyen pour Bruce Meyer, mais pour l’acheteur, une machine incroyable qui n’a pas son pareil.
Entre 2000 et 2500 Tow’ds ont été produits entre 1968 et la fermeture de l’usine en 1971 (ndlr : comparativement le Manx , c’était 5000 à 5500, et 200 Manx SR). Dans beaucoup de livres, la production ne fut que de 850. En fait tous les enregistrements relatifs Tow’d avaient été détruits lors de la fermeture de l’usine, seules restaient les données sur les 850 premiers (d’où le nombre publié dans Dune Buggy Handbook par exemple).
Bonjour Monsieur, je voudrais un TOW’D s’il vous plait.
En 1968, le MEYER TOW’D était un kit permettant de construire à moindres frais et en quelques heures (disons plutôt jours…) un engin » OFF ROAD only » redoutable , permettant selon humeur soit d’aller jouer dans le sable le WE ( ambiance » glacière coca », burger aromatisé au sable, cheveux longs et guitare sèche), soit de se défouler dans des compétitions TT ( ambiance » le premier qui freine est un lâche ! »).
Le Tow’d n’était originellement pas homologué route, mais avait reçu l’homologation NORRA lui permettant de participer à toutes les compétitions off road américaines.
Pour se rendre sur les lieux par la route, on attelait gentiment la barre intégrée dans le nez du Tow’d (d’ou son nom – tracté) à l’attelage du pick- up familial et en avant pour un défoulement sablonneux ou poussiéreux.
Mais avant de s’éclater, il fallait l’assembler car le Tow’d n’était pas un véhicule clé en main, mais un uniquement kit, disponible en trois niveaux de finition :
Il fallait comme pour le MANX trouver une coccinelle modèle 1955 à 1965 donatrice, ou simplement les pièces suivantes (à l’inverse du Manx, le Tow’d possédait son propre châssis sauf le train AR) :
– Un train avant complet (à pivots, only) avec freins, direction et suspensions
– Un train AR coupé au niveau du tube de barre de torsion avec suspensions, freins, et groupe propulseur
– Le levier de vitesse et sa tringlerie
– Un ensemble pédalier avec maître-cylindre, réservoir de liquide de frein , canalisations et câbles
– Le levier de frein à main avec ses câbles
– Le compteur et son câble, le commodo de phare, le moteur d’essuie glace et sa commande
A partir de ces éléments , le futur propriétaire pouvait choisir différents kits selon ses capacités techniques et financières
Le kit « 22 » : la base pour bricoleur disposant de compétence en soudage. Vendu à l’époque 349$, il était composé de :
– une coque en plastique thermoformé incluant les sièges
– un châssis tubulaire pré-formé à souder ( la coque servant de gabarit)
– un support acier de levier de vitesse
– un arceau (à assembler)
– un réservoir
– un kit de boulonnerie et une notice de montage
Le véhicule ainsi réalisé répondait à un seul cahier des charges : aller partout…le confort et la protection étaient en option (pas de capot, pas de pare brise et pas de coussin de sièges !)
Le kit « 33 » : le premier kit sans soudure pour débutant (féru de mécano quand même). Vendu à l’époque 399$, il était composé de :
– une coque en plastique thermoformé incluant les sièges
– un châssis tubulaire soudé et assemblé
– un arceau assemblé et peint (en noir, eh non pas chromé)
– Une fixation de direction ajustable en hauteur
– un réservoir
– une planche de tableau de bord peinte (en clair, une tole trouée)
– Un levier de frein à main directeur (la version manuelle de l’autobloquant)
– Une barre de traction rétractable
– Un ski de protection
– un kit de boulonnerie et une notice de montage
Outre sa facilité de montage, le véhicule réalisé était un peu plus évolué notamment grâce à son frein à main directeur et son ski de protection
Le kit » 44 » : le pack « luxe ». Vendu à l’époque 499.95$, il offrait de série des éléments futiles et luxueux … tels que les phares et les sièges et le volant ! Le kit était alors composé de :
– Une coque en plastique thermoformé incluant les sièges
– Un châssis tubulaire soudé et assemblé
– Un arceau assemblé et peint (en noir, eh oui pas chromé ;-))
– Une fixation de direction ajustable en hauteur
– Un réservoir
– Une planche de tableau de bord peinte avec boutons et commandes
– Un levier de frein à main directeur
– Une barre de traction rétractable
– Un ski de protection
– Des housses de sièges rembourées (SVP) fixées par boutons pressions sur la coque
– Un faisceau électrique
– Des phares AV peints en noirs avec cerclos chromés
– Des feux AR rouges à monter sous l’arceau (pas sur les ailes AR…)
– Un volant tulipé 13 pouces
– un kit de boulonnerie et une notice de montage
Avec ce kit, l’acheteur disposait de toutes les pièces pour réaliser facilement un Tow’d avec un simple jeu de clés (chapeau Monsieur MEYER !)
Toujours manquant à l’appel : le capot et le pare-brise toujours considérés comme des accessoires !
Je peux vous dire que conduire un Tow’d sans capot ni pare brise… c’est sport ! C’est un peu comme si on avait scotché une baignoire sur deux Honda 500CR. Dans le sable avec des pneus à palettes, je n’imagine même pas !
A ces kits pouvaient s’adjoindre des options, destinées à améliorer les capacités Offroad de l’engin, le rendre moins spartiate ou simplement à l’embellir. Il était toujours à l’époque hors de question de produire des éléments destinés à civiliser le Tow’d et encore moins à le rendre « street legal ».
Le catalogue d’options comportait :
– Pare brise et capot :
– Pare chocs AV (tube chromé) :
– Pare chocs AR (tube chromé) : 19.95 $
– Ski de protection moteur : 19.12 $
– Volant 13 pouces : 16.99 $
– Pneus AV Gates Commando en 7.35 /14 (eh oui pas 15p !) : 21.99$
– Pneus AR Gates Commando en 30×9.5 /15 : 31.49$ les célèbres !
– Pneus AR Good Year Ten 31×15.50-15 : 75.49$ ideal pour labourer votre jardin
– Jantes acier peintes style origine élargies AV en 6×14 : 22.95$
– Jantes acier peintes style origine élargies AR en 8×15 : 25.95$
– Jantes acier peintes style origine élargies AR en 10×15 pour Terra tires : 30$
– Jantes acier peintes style origine élargies AR en 12×15 pour Terra tires : 30$
– Jantes acier Chromées spéciales tow’d (voir encart) AV en 6x 14 : 35.49$
– Jantes acier Chromées spéciales tow’d (voir encart) AR en 8x 15 : 49.49$
– Pot d’échappement sport » upswept » pour moteur 1300/1500 : 42.49$
Les jantes optionelles très rares et tres lourdes et Capot racing d’origine, mais arceau tres personnel
Sur commande, étaient également disponibles :
– Capot AV racing, sans pare brise
– Amortisseurs spéciaux
– Ceinture de boite
– Kit d’adaptation pour moteur Corvair 6 cylindres.
– Rétroviseurs…
Teintées dans la masse, les couleurs disponibles étaient au nombre de cinq :
Au secours , ça craque !
Après quelques mois de production (380 modèles livrés), le plastique thermoformé incassable qui devait être révolutionnaire, craque sur un très grand nombre de coques et fond quasi instantanément au contact du liquide de frein ! Les premières coques concernées sont rapatriées à l’usine pour y être remplacées. Pour couronner le tout, la procédure de réparation qui devait être aussi révolutionnaire et simplissime … ne marche pas ! !
BF MEYERS Company décide donc de stopper momentanément la production des Tow’d malgré la demande croissante. Toutes les coques vendues sont rapatriées. Le processus de fabrication est modifié: l’ancienne méthode utilisant la fibre polyester est à nouveau mise en oeuvre. La production reprend avec des coques stratifiées cette fois.
Peu après cette aventure, la demande est toujours croissante, mais une autre demande imprévue vient encore une fois compromettre les plans de BF Meyer Company. En effet, le réseau de distributeur de BFM, rapporte une demande croissante d’équipements pour civiliser le tow’d : des ailes, des capots moteurs… Malgré une opposition farouche de Bruce Meyer, celui-ci se ravisa sur les conseils de ses collaborateurs.
Ces pièces étaient assez simples à produire, et les précédentes aventures ayant fortement compromis les marges bénéficiaires du Tow’d, BF M vit dans cette commercialisation un moyen de limiter les dégâts.
Ainsi naquit le Tow’dster, crapaud des villes, qui malgré lui répondait aux exigences de l’équivalent de la « DRIRE » Américaine et qui fut sans plus attendre homologué route par les propriétaires. Ainsi équipé, un Towd’ster, ça donnait ça :
Les éléments TOWDSTER et le MEYER TOW’D équipé TOWDSTER
Les copies et la concurrence de l’époque :
Comme tout concept novateur et à succès, le Meyer Tow’d fut copié et concurrencé, mais sans commune mesure avec le MANX.
A- LES COPIES :
Deux marques US commercialisèrent en 1969, un engin quasi identique :
– Le FIBERJET SAND HOPPER (voir publicité d’époque dans l’encadré)
– Le VAQUERO (moins distribué)
En europe aussi, le concept fut copié avec quelques légères modifications, histoire de dire, « c’est moi qu’il l’ai fait ! »
C’est ainsi qu’en 1970, naquit l’APAL MEXICAN, qui eut pas mal de succès dans les courses tout terrain belges et françaises des années 70.
Le Mexican est lui aussi loin d’être mort, puisque les moules et gabarits ont été DONNES contre bon soin à un passionné du sud ouest (« Bah, petit, c’est ça les relations !« ). Après avoir rencontré le nouveau propriétaire, les moules semblent être entre de bonnes mains, loin des aspirations mercantiles dans lesquels certains sont tombés.
B- LA CONCURRENCE :
Il est difficile de parler de concurrence car le concept du Tow’d était basé sur l’essence même du buggy, à savoir, un engin simpliste, à monter dans son garage et permettant à moindre frais de crapahuter dans les dunes et terrains cassant. Donc globalement tout les buggies tout terrain et ancêtres des Sandrails étaient des concurrents qu’ils soient uniques, artisanaux ou de marques plus connus.
A dans quelques jours, pour la seconde partie …
Dossier réalisé par Olivier VERGNAUD