Comprendre et calculer : le Rapport Volumétrique

Ce petit chiffre, parfois donné dans la fiche technique d’un moteur est le plus méconnu de toute la panoplie de la préparation moteur, et ce n’est pas pour rien. Nous allons voir comment le calculer, jusqu’où on peut aller, et pourquoi faut-il toujours faire attention à ne pas trop en mettre. Enfin, tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur le rapport volumétrique sans avoir osé poser la question !

Qu’est que ca veut bien dire, ce chiffre ? C’est facile, faut juste le dire une fois simplement, et ensuite vous saurez, ou… je ne sais pas me faire comprendre … gasp, faut pas que je me loupe !

Prenez un volume de 10 litres, et réduisez ce volume pour qu’il ne fasse plus que 1 litre. L’air contenu sera forcement bien plus comprimé, mais surtout, vous aurez un rapport de volume de 10 :1, c’est à dire de 10 litres à 1 litre.

Si vous décrochez déjà, pas la peine d’aller plus bas …)

Comment le calculer ?

Il y a une bête formule, mais c’est simplement les 10L / 1 L, adapté à notre moteur c’est: Le volume total / volume restant, sur un cylindre, bien sûr.

Soit V1 le volume du cylindre
Soit V2 le volume restant en haut du cylindre, quand le piston est au plus haut (PMH)
Soit V3 le volume de la chambre de combustion

Nous avons la formule :
(V1+V2+V3) / (V2+V3)

Calculons chaque volume :

V1 : ((Pi x D²)/4)x H

Pi = 3,1415926535 (« Que j’aime à faire apprendre un nombre utile aux sages… », et comptez les lettres, c’est mon prof de math qui m’a donné ce truc … faut que ca serve !)
D = diamètre du piston, en cm
H = hauteur : course du piston en cm

Soit pour notre projet 1776cc (ceux qui n’ont pas suivi sont invités à jeter un oeil dans le dossier « Préparation Moteur ») :
((3,1415926535 x 9.05 x 9.05 ) / 4) x 6.9 = 443.85cc (cylindrée unitaire)

Le calcul de V2 ...

V2 : ((Pi x D²)/4)x H’
Tout pareil sauf la hauteur H’ qui n’est plus la course, mais la distance restante (Deck hight piston)
Cette distance est à mesurer, avec une jauge de profondeur, un palmer, ou tout autre appareil permettant une mesure correcte. Certains annonceurs vendent un appareil, fait d’une plaque épaisse, percée d’un trou taraudé au pas de 100 . En mettant une règle sous cette plaque au départ, pour caler le « zéro », puis en comptant les tours, il est possible de faire une mesure: 1 tour = 1mm / 1 tour et 2/3 d’un autre = 1.66mm, mais je préfère de loin la méthode classique . Notez aussi que certains pieds à coulisse peuvent faire des mesures de profondeur .

Soit pour notre projet :
H’ = 1.54mm, soit 0.154cm
((3,1415926535 x 9.05 x 9.05 ) / 4) x 0.154 = 9.91cc

La détermination de V3 ...

V3 : ………. Que celui qui est capable de me sortir la formule me jette la première bière !

Ici, il n’y a pas le choix, il faut mesurer via un liquide, qui déterminera le volume de la chambre de combustion .
Pour se faire, il faut simplement remplir la chambre d’eau ou d’alcool (mieux) et regarder la quantité nécessaire pour remplir complètement ce volume. Pour éviter toute erreur il est nécessaire de mettre une plaque en Plexiglas pour éviter un trop plein de liquide, et avoir une surface bien plate. Remplissez par un trou fait dans cette plaque, et chassez la dernière bulle, le tour sera joué. Le remplissage peut se faire via une seringue (en général, la pharmacienne vous regarde bizarrement, surtout si vous commencez à lui expliquer pourquoi vous en voulez une …) ou une colonne graduée.

Soit pour notre projet :
Résultat de la mesure : 53cc

Résultat :
(V1+V2+V3) / (V2+V3)

443.85cc + 9.91cc + 53cc / 9.91cc + 53cc = 506.76/62.91 = 8.06 : 1

Super, on sait maintenant quel est notre rapport volumétrique !

Comment peut on faire varier ce chiffre ?

Pour le faire varier, c’est assez simple:
Pour le diminuer, il suffit d’agrandir la chambre de combustion, comme indiqué dans le sujet sur la préparation des culasses, en améliorant le remplissage, ou en faisant un usinage hémisphérique. Attention, il serait tentant de mettre une rondelle de cuivre, qu’on trouve maintenant assez facilement dans les magasins, mais il faut faire attention à ne pas avoir trop d’espace en haut du piston: le deck hight. Il faut mettre une valeur entre 1mm et 1.7mm, en fonction de la qualité de vos bielles / vilo, pour avoir un bon coincement des gaz, générant une grosse turbulence, et améliorant l’homogénéité du mélange air / essence par un brassage forcé. De plus, cela concentre les gaz près de la bougie. Si vous voulez mettre une rondelle de cuivre, pour une bonne étanchéité, il faudra diminuer la hauteur du cylindre, ou faire une gorge dans la culasse (moins bien pour les fonderies anciennes, il n’y a pas beaucoup de matière en dessous, surtout si elles ont déjà été fraisées).
Pour l’augmenter, vous pouvez jouer sur le deck hight piston, dans une faible mesure, mais surtout en fraisant la culasse, augmentant l’emboîtement du cylindre . Attention, il faut impérativement fraiser de manière identique les 2 chambres d’une même culasse, sous peine de voir une culasse bancale ! vous ne le verriez pas forcement, et après serrage, tout semblerait OK, mais ferait souffrir rapidement votre culasse.

Il est à noter qu’il faut souvent le diminuer, plutôt que l’augmenter, car l’augmentation de la cylindrée entraîne automatiquement un accroissement du rapport volumétrique.

Mais … qu’est ce qu’il faut mettre ?

Et bien, c’est justement là que les choses se corsent !

En effet, il y a les pro, et les anti !
Et souvent, c’est par idées reçues, car rien n’est jamais noir ou blanc, tout est nuance de gris (c’était la séquence philosophie).

VW mettait très peu de R.V., favorisant la fiabilité .
Avoir peu de rapport volumétrique. favorise cette fiabilité, car évite les surchauffes, même avec de l’essence de très mauvaise qualité: Je vous rappelle que votre VW a certainement eu de l’essence ordinaire dans son réservoir ! ! ! que votre cox devait pouvoir aller partout, dans des pays où l’on coupe l’essence avec de l’alcool de patate, de canne à sucre ou de betterave. L’indice d’octane est alors très faible, et le cliquetis guète si on s’aventure à augmenter le R.V.

Maintenant, L’essence est de bien meilleure qualité que l’ordinaire, (même si elle a déjà été meilleure …) et on peut sans crainte augmenter ce rapport, générant par la même occasion un gain de puissance non négligeable.
Gene Berg, voyant qu’il y avait quelques watts à gagner de ce côté là, s’était penché sur le problème depuis longtemps. Il a établi cette règle entre le rapport volumétrique et l’indice d’octane :

R.V. coef multiplicateur Indice d’Octane

6.6 13.4 88.1
6.8 13.2 89.8
7.0 13.0 91.0
7.7 12.3 94.7
8.0 12.0 96.0
8.5 11.5 97.8
9.0 11.0 99.0
9.5 10.5 99.8
10 10.0 100
10.5 9.95 104.5
11.0 9.90 108.9

Vous avez compris le principe, et vous voyez qu’il y a vite une limite. En fait, G.Berg admet pouvoir augmenter le rapport volumétrique de + 0.5 en faisant un semi-hémispèrique, ou 2 pseudo, car diminuant des points de compression, comme dans une chambre  » baignoire  » d’origine, usinage qui limite le cliquetis ou auto-allumage.
Méfiez vous des « octane booster », car ils ne conviennent souvent pas, voire pire …
Les rares bons sont extrêmement toxiques, à manier avec précaution. Les autres partent du principe que pour que le client soit content, il faut qu’il n’y ait plus de cliquetis: Pas de pb, ils ont ajouté des charges minérales réduisant l’inflammation, et ca limitera aussi des détonations non voulues. Ca marche, mais en limitant l’inflammation, on diminue du même coup l’énergie développée par l’inflammation normale générée par la bougie ! ! !

Anti-cliquetis

Résultat: perte de puissance ! Un comble, on augmente le rapport volumétrique, tellement qu’il faut utiliser de l’octane booster, pour arriver au final à moins de puissance que si on avait rien fait ! Le prix du produit en plus … Cherchez l’erreur ! !
Il existe bien de l’essence de compétition, allant jusqu’à des indice d’octane indécent, jusqu’à 120, mais inutile de penser en avoir à la pompe du coin, et côté tarif … forget it !

En fait, la limite que vous commencez à cerner … n’est pas là ! ! ! Le problème vient du refroidissement. Plus on refroidit, moins on risque le cliquetis, et donc plus on peut avoir un rapport volumétrique élevé. Avec un refroidissement stock; les données ci-dessus sont bonnes, mais avec un refroidissement style Porsche, avec de bons déflecteurs dirigeant l’air frais sur les culasses, vous pouvez encore augmenter votre R.V. d’un demi point. Sur les moteurs refroidis par eau, le refroidissement est excellent, et le R.V. peut atteindre de série 13 :1 en toute sérénité.

Quel est le gain ?

Là encore, difficile de répondre par des chiffres précis, car la configuration moteur est élément déterminant, et particulièrement la culasse et l’arbre à cames.
Sur un 1600cc stock, le fait de passer le rapport volumétrique de 7.7 :1 (stock) à 8.5 :1 fait gagner 5cv env. sans inconvénient important. Il chauffera un peu plus, mais peut se le permettre sans difficulté.
Sur une autre configuration, le gain peut être de 20cv: en utilisant un arbre à cames avec énormément de croisement de soupapes, d’overlap, comme le Engle FK 89 qui a plus de 60°de croisement, le fait de passer de 8.5 :1 à 9.5 :1 fera revivre ce moteur. Avoir beaucoup de croisement oblige un R.V. élevé pour un bon fonctionnement, particulièrement dans les bas régimes et les intermédiaires. Par contre, il ne servira à rien d’aller au delà des 9.5 :1, le gain de puissance sera négligeable, et la température s’envolera.

Pour une config. avec un refroidissement stock, et des culasses de fonderie style VW, il est préférable de rester dans la plage des 8.0 :1 // 9.0 : 1 pour garantir une bonne fiabilité.
Si le but est d’être devant pendant les Runs, et que vous n’utilisez pas votre VW pour faire de long trajet, vous pouvez vous permettre quelques petits excès, dans la limite du raisonnable.

Mais dans tous les cas, je pense que vous l’aurez compris, il faut faire attention à ce chiffre, car il peut être déterminant. Le hasard n’est pas de mise, et monter un moteur sans se préoccuper de ce facteur peut vite coûter cher.

Donc: (V1+V2+V3) / (V2+V3) ....

A vos calculatrices !