Les moteurs de nos VWs ont pour la plupart 30, 40 voire 50 ans. Autant dire que avant de tomber entre nos mains amoureuses, ils ont eu le temps d’avoir plusieurs vies plus ou moins agitées et n’ont peut-être pas toujours bénéficié d’un entretien scrupuleux… Les filetages présents dans l’alliage tendre du carter et des culasses peuvent souffrir voire se détériorer irrémédiablement si l’on utilise des goujons au mauvais pas, si le couple de serrage n’est pas scrupuleusement respecté ou si l’on foire le filetage de bougie.
Détérioré « irrémédiablement » ? Pas si sur, car il y a le filet rapporté qui peut permettre de sauver une culasse […]
Le démontage des collecteurs d’échappement de ce moteur type 4 met en évidence ce qui arrive bien souvent: l’aluminium du filetage de gauche est complètement « bouffé » et le goujon ne tient plus. A moins d’avoir gagné au loto, on ne va pas remplacer la culasse pour si peu, on va la sauver en posant un Helicoil, plus connu sous nom de « filet rapporté ».
Comment ça marche ?
Le filet rapporté (ou HELICOILS) se présente sous l’apparence d’un ressort venant se loger dans le trou re-taraudé. Le fil laminé en section losange est en acier inoxydable chrome-nickel austénitique résistant à la corrosion et aux températures élevées. Il a une résistance à la traction d’environ 1400 N/mm² et est enroulé en hélice avec des tolérances serrées. Le filet forme deux filetages concentriques de haute précision, l’un extérieur, l’autre intérieur. Son coefficient de frottement est inférieur de 90% à un taraudage usiné. Il en découle une résistance à l’usure supérieure à un filetage traditionnel ainsi qu’une capacité de charge accrue.
En développant à l’extrême, on se rend compte qu’avec un filet rapporté l’élasticité du fil Inox favorise une meilleure répartition des charges et de la contrainte. Le filet rapporté forme une sorte de « joint » entre la vis et le filet
Le filet rapporté est vissé à l’aide d’un outil spécial dans le trou retaraudé avec un taraud spécifiquement adapté à l’HELICOIL devant être installé. C’est ce travail que nous allons décrire pas à pas …
Le mode opératoire
Dans le souci de donner la meilleure visibilité, nous avons réalisé la démonstration sur un bloc d’alu et non pas sur la culasse endommagée. L’objectif est donc de poser un filet rapporté destiné à recevoir un goujon d’échappement M8
Première étape, se procurer l’outillage, ici sous la forme d’un coffret spécifique à la pose des HELICOIL en M8, que l’on trouve entre 50 et 70 Euros, selon les fabricants:
– Une mèche spéciale diam. 8.4 mm
– Un taraud spécial
– L’outil de pose
– Un manchon pour casser l’ergo entraîneur
– Une pochette d’HEILICOIL
Le prix du coffret peut paraître onéreux, mais c’est l’outil d’une vie. Quand on regarde le taux horaire de tout usineur sérieux, on comprend rapidement l’intérêt de l’investissement.
Pour commencer, le perçage de notre bloc d’alu au diamètre standard de 8 (pour figurer l’ancien filetage) ne pose aucune difficulté particulière. On passe ensuite la mèche spéciale de 8.4 dont le rôle est de nettoyer le trou de son ancien filet détérioré
Les différents diamètres de perçage, selon le diamètre de la vis que recevra le filet HELICOIL :
Vis | Diam. Foret | Vis | Diam. Foret |
M6 | 6.3 | M7 | 7.3 |
M8 1.25 | 8.4 | M8 1.0 | 8.3 |
M9 1.25 | 9.4 | M10 1.0 | 10.25 |
M10 1.25 | 10.4 | M10 1.5 | 10.5 |
M11 1.5 | 11.5 | M12 1.75 | 12.5 |
Les table de correspondances complètes sont en général livrées dans les coffrets.
On attaque alors le taraudage. Les premiers tours sont primordiaux: il faut « partir droit » car sur une culasse on a pas vraiment le droit à l’erreur. On tourne doucement le taraud en revenant de temps en temps en arrière afin de casser le copeau d’aluminium. On peut également aider les chose en pulvérisant avant dans le trou et sur le taraud un petit coup de bombe kivabien (Loctite 8031)
On prepare l’outil et le filet à poser dans le trou tarauder. On insère le filet dans l’outil (entraineur vers l’extérieur) et on le visse dans le nez jusqu’à ce qu’il affleure le bord.
On positionne alors le nez de l’outil sur le trou fileté et l’on commence à visser doucement. Le vissage va étirer le filet HELICOIL à ses cotes intérieures et extérieures nominales. ATTENTION, il est impossible de revenir en arrière, le système étant auto-freiné. Ici, j’ai volontairement fait déboucher le filet pour illustrer l’entraînement par l’encoche de l’outil
Positionner en tournant la broche, la dernière spire du filet HELICOIL de 1/4 à 1/2 pas en dessous de la surface de la pièce. L’opération de montage étant terminée, dégager l’appareil. Dans le cas d’un trou débouchant, pour laisser le passage libre, l’entraîneur du filet est cassé uniquement par le rupteur HELICOIL, en donnant sur ce dernier un coup sec. Ne pas casser l’entraîneur avec la broche de pose mais avec le manchon spécial.
Ca y est, c’est terminé. Notre filet Inox est positionné dans le filetage et il peut recevoir le goujon M8 qui pourra être serré, desserré, vissé, dévissé sans la moindre crainte à l’avenir !
Et les « inserts » dans tout ça ?
J’anticipe les questions des habitués… Il y a deux techniques pour sauver des filetages: le filet rapporté que l’on vient de voir et l’insert. Chacun a des avantages et des inconvénients. L’insert se présente comme une pièce solide, percée et taraudée, à installer dans un trou.
Le filet rapporté n’est viable que sur des diamètres supérieurs à M4 ou M5 alors que l’insert attaque beaucoup plus petit. L’insert ne nécessite pas de taraud à cote spécifique. Par contre, il nécessite plus de matière autour de lui car le trou qui le réceptionne est sensiblement plus grand que le diamètre nominal de la vis qu’il va accueillir. Dans le cas d’école qui nous intéresse (goujons d’échappement sur culasse T4) on voit sur la photo du haut qu’il n’y a pas énormément de matière autour du trou …
Enfin, j’aurai tendance à dire qu’on tentera toujours d’abord la pose d’un HELICOIL et que l’on ne se tournera vers l’insert qu’en cas d’échec de la pose de l’HELICOIL : il est toujours plus facile d’enlever de la matière que d’en remettre !